TERRITOIRES EN QUESTION
Rêve pavillonnaire, les dessous d'un modèle
Popularisées dans les années 1970, les zones pavillonnaires incarnaient le rêve d'une classe moyenne alors en pleine expansion. Elles se sont aujourd’hui transformées en cauchemar : temps de transport interminables, relégation sociale, impact sur l’environnement… Quel était donc le projet à l’œuvre dans cette architecture de pavillons isolés, standardisés et bon marché ? Qui sont ceux qui y vivent, quels étaient leurs rêves et quelle est leur réalité ? Et quel est enfin l’impact de ce modèle urbanistique sur nos vies et sur notre environnement ?
Inédit en DVD dans les médiathèques.
Éloignement, embouteillages, coût élevé pour les communes… Le modèle du
lotissement périurbain est-il en bout de course ? Le film documentaire Rêve
pavillonnaire, les dessous d’un modèle tire le bilan passionnant d’un phénomène qui a modelé le paysage
français depuis cinquante ans.
Dans les années 1960, les zones pavillonnaires incarnaient le rêve de
l’accession à la propriété pour une classe moyenne en plein boom.
Cinquante ans plus tard, ce modèle d’urbanisme qui a remodelé le paysage
périurbain semble avoir atteint ses limites. Dépendants de leurs
voitures, éloignés des centres-villes et des services publics, parfois
étranglés par les emprunts immobiliers, ceux qui y vivent disent
aujourd’hui leurs désillusions et leurs difficultés quotidiennes dans un
documentaire passionnant, Rêve pavillonnaire, les dessous d’un modèle. Partie enquêter dans ces lotissements entre ville et campagne avant que
n’émerge le mouvement des gilets jaunes, la journaliste Myriam Elhadad
raconte comment le blues de leurs habitants fait écho au mouvement et
aux revendications entendues sur les ronds-points. Son film rappelle
l’urgence politique à repenser cet aménagement du territoire expansif
dont la facture sociale et écologique s’avère aujourd’hui très lourde…Ce que l’on mesure aujourd’hui, c’est le prix à payer, souvent très
lourd, de ce rêve de maison individuelle. Un coût qui se chiffre en
heures passées dans les transports, dans les charges et les
remboursements d’emprunts qui pèsent parfois bien plus que prévu sur le
budget des familles et les obligent à se serrer la ceinture… Ceux qui
ont fait ce choix, souvent pour offrir une meilleure qualité de vie à
leurs enfants, ne s’imaginaient souvent pas que cela les mènerait à de
tels sacrifices au quotidien. Bien sûr, le tableau n’est pas tout noir,
ceux que j’ai rencontrés se réjouissent d’avoir un jardin, de pouvoir
être propriétaires. Mais ils doivent parfois supporter cinq heures de
trajet quotidien pour aller travailler…
L’habitat pavillonnaire, c’est un des éléments
d’un modèle d’aménagement du territoire qu’a très bien décrit
l’urbaniste David Mangin dans son livre La France franchisée.
Un système à la fois urbanistique et social, où se rencontrent plusieurs
acteurs : l’État, avec ses politiques incitatives d’accession à la
propriété, les promoteurs privés et le client lui-même, qui aspire à
fuir la promiscuité des logements collectifs de centre-ville, veut son
pavillon, son jardin, rêve d’une meilleure qualité de vie et d’un toit à
lui, qu’il ne peut pas s’offrir dans des grandes villes devenues
inabordables. Plusieurs décennies de
politique de décentralisation ont encouragé ce modèle d’urbanisme
extensif. Et les communes se sont mises à se faire concurrence pour
accroître leur population et l’activité sur leur territoire. Chaque
maire voulait son lotissement, sa zone commerciale, et ça a créé un
chaos urbain. On mesure
aujourd’hui le coût écologique de ces zones pavillonnaires. Parce
qu’elles obligent leurs habitants à être dépendants de leurs voitures
faute de transports collectifs, parce qu’elles grignotent
progressivement la campagne, les terres cultivables, mais aussi parce
que ces maisons individuelles, mal isolées, sont parfois de véritables
passoires thermiques. Il y a aujourd’hui une urgence politique à
s’intéresser à ces zones périurbaines et à repenser un modèle
d’urbanisme expansif qui ne fonctionne plus. Depuis quelques années, on
observe clairement une prise de conscience, avec la mise en place de
mesures pour freiner cet étalement urbain. J’ai le sentiment que nous
nous trouvons aujourd’hui à un moment de transition, de bascule. De plus
en plus de maires s’attachent à redensifier les centres-villes, à
construire en hauteur, à combler les dents creuses. Mais c’est un
travail de dentelle, presque au cas par cas, sur des petites parcelles,
qui demande plus de temps et de réflexion que la construction d’une
énième zone pavillonnaire. Aujourd’hui,
80 % des Français continuent à rêver d’un habitat individuel avec un
espace extérieur. Mais pourquoi ne pas imaginer par exemple des maisons
superposées ? On voit émerger des initiatives innovantes telles que
Build in my backyard, pour densifier l’habitat urbain en construisant
des maisons supplémentaires dans les jardins des lotissements
pavillonnaires. Émergent aussi des solutions inventives en matière de
transports, comme dans ce lotissement à la périphérie de Rennes où les
habitants mutualisent une voiture pour éviter que chaque famille ait son
propre véhicule. D’une manière
générale, il y a aujourd’hui une demande de démocratie participative
pour tout ce qui concerne l’urbanisme. Les gens ont envie d’avoir leur
mot à dire sur l’aménagement du territoire où ils vivent. Leur cadre de
vie ne peut plus être le fruit d’une décision centralisée venue d’en
haut. Virginie Félix. Télérama.fr
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