Installé au volant de son taxi, Jafar Panahi sillonne les rues animées de Téhéran, capitale de l'Iran. Au gré des passagers qui se succèdent et se confient à lui, le réalisateur dresse le portrait de la société iranienne, entre rires et émotion. Si la loi exige de déformer la réalité pour réussir à faire un film « diffusable », alors Panahi prend un malicieux contre-pied en faisant du réel une fiction, à travers les récits de diverses exactions qui font de l’humain une force que l’autorité ne peut contrôler.

* Ours d’or au festival de Berlin en 2015 et Ours d'argent du "Meilleur réalisateur", du "Meilleur scénario" et du "Meilleur acteur "

* César "Meilleur film étranger" 2016

Quel film fascinant ! Drôle, indispensable, diaboliquement intelligent. Positif

Vif, délié, narquois juste ce qu’il faut dans l’exhibition d’une clandestinité opérant en plein jour et ouverte à tous les vents, il est avant tout un film dégainé comme un réflexe. Les Cahiers du Cinéma

Ce taxi-là roule sans permis. C’est un plateau de cinéma monté sur roues, le véhicule d’un insoumis. Combien d’interdits l’Iranien Jafar Panahi (Le Cercle, Le Ballon blanc) brave-t-il en prenant lui-même le volant ? En installant une petite caméra dans l’habitacle ? Depuis 2010, pour avoir osé contester la réélection de Mahmoud Ahmadinejad, le cinéaste n’a pratiquement plus aucun droit : ni parler en public, ni quitter le pays. Et surtout ni exercer son métier. Et pourtant, il tourne. Taxi Téhéran est une œuvre « illégale ». Dans les rues bruyantes de Téhéran, Jafar Panahi ouvre ses portières à toute la société iranienne. Polémiques, négociations, témoignages, embrouilles, et même crises de panique : la voiture vibre comme une formidable caisse de résonance politique. Mais ce dispositif, façon agora itinérante, est aussi une virée introspective. Sous ses allures de savoureux conte persan — une sarabande de rencontres souvent drôles, parfois terribles ou poétiques, tel ce duo de vieilles dames superstitieuses et leur poisson rouge —, Taxi Téhéran est un autoportrait de l’artiste au volant. La forme même est à la fois ambiguë et révélatrice : fausses tranches de réalité volées en caméra cachée, vraies scènes de fiction. Une zone floue, à la lisière du documentaire, que le réalisateur aime occuper dans ses films. Ici, beaucoup de passagers interprètent leur propre rôle. Mais, à travers chaque personnage, c’est sa propre place de cinéaste, de témoin et de créateur que questionne l’homme qui conduit le film. Cécile Mury - Télérama

Après des études de réalisation au Collège de Cinéma et de Télévision de Téhéran, Jafar Panahi réalise plusieurs courts et moyens métrages pour la télévision de son pays. En 1992, il met en scène le téléfilm L'Ami, puis est engagé comme assistant d'Abbas Kiarostami sur Au travers des oliviers. En 1995, d'après un scénario de son ami Kiarostami, il réalise son premier long-métrage, Le Ballon blanc, qui remporte la Caméra d'Or à Cannes la même année. Il signe ensuite Le Miroir, un documentaire "cinéma-vérité" dans lequel il retrouve l'actrice Aida Mohammadkhani pour la deuxième fois. Le film remporte le Léopard d'or au Festival de Locarno 1997. Trois ans plus tard, le cinéaste décroche le Lion d'or à Venise pour Le Cercle (2000). En 2003, Jafar Panahi met en scène son quatrième long métrage Sang et or, qui raconte le drame d'un modeste livreur de pizzas mettant la main sur un sac de billets. Trois ans après sort Hors jeu, dans lequel des femmes tentent d'assister à un match en dépit de leur interdiction de stade. Les réalisations de Panahi lui valent d'être considéré comme subversif par le régime iranien.
En 2010, le cinéaste iranien Jafar Panahi s’est vu interdire par le gouvernement iranien de quitter le territoire et de réaliser des films. Et pourtant, en à peine cinq ans, il est parvenu à réaliser quatre films qui ont tous clandestinement voyagé vers des festivals internationaux. En 2011, Panahi réalise avec l'aide du cinéaste Mojtaba Mirtahmasb Ceci n’est pas un film, sorte de dispositif filmique où il s'interroge sur la condition actuelle du cinéma iranien. Deux ans après, il réalise Closed Curtain qui lui vaut le prix du meilleur scénarioà à la Berlinale puis en 2015, Taxi Téhéran. Un film iranien dans une voiture ? Il y a une certaine ironie à voir Panahi utiliser à son tour le procédé fétiche de l’autre maitre iranien : Abbas Kiarostami. Les deux cinéastes ont chacun engendré une descendance bien distinctes et la rencontre de ces deux familles a de quoi amuser. Et pourtant la différence saute aux yeux. A l’élégante couche de vernis théorique (parfois carrément lente) de Kiarostami, Panahi préfère une voiture remplie de vie. Installé au volant et grimé d’une casquette qui ne trompe personne, le réalisateur faussement converti embarque des inconnus, et à chaque nouveau client qui s’installe à l’arrière, c’est tout un éventail de genres cinématographiques qui s’invite, avec un rythme trépidant. En 2018, Jafar Panahi réalise Trois visages qui recevra le Prix du scénario à Cannes. Le cinéaste est actuellement toujours interdit de quitter le territoire et de réaliser des films.

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Ce film est interdit aux moins de 18 ans.