Dans un appartement dont les murs sont recouverts de petits livres rouges, des jeunes gens étudient la pensée marxiste-léniniste. Considéré comme un film prophétique, annonçant mai 68, un témoignage d'une époque et une belle originalité de la mise en scène.

En l'absence de ses parents, Véronique transforme l'appartement familial bourgeois en cellule de réflexion maoïste. ­Etudiante à Nanterre, elle veut abolir la ­séparation entre classe de philo et classe ouvrière. Son jules, Guillaume, qui envisage d'être acteur, participe à ces meetings domestiques, tandis qu'une fille venue de la campagne, Yvonne, époussette Le Petit Livre rouge en écoutant Radio Pékin. C'est le début des années politiques de Godard, qui va radicaliser son engagement. Ici, il est déjà très militant, mais avec des fulgurances poétiques comme dans cette scène où la géniale Juliet Berto, ­sommée de donner une définition du marxisme-­léninisme, répond en parlant du soleil couchant. Les couleurs sont celles des années pop : rouge, jaune, bleu, blanc, comme la robe d'Yves Saint Laurent en hommage à Mondrian, créée un an plus tôt. Godard capte son époque en marche : La Chinoise, « un film en train de se faire », annonce le générique. Mai 68 se prépare, et le cinéma devient un révélateur prophétique. Bien sûr, les discours idéologiques saturent le film, mais ils ouvrent sur quelques échanges stimulants, comme la discussion entre Anne Wiazemsky et le philosophe Francis Jeanson, qui joue son propre r­ôle. Un ­témoin de choix dans un film témoin. Frédéric Strauss. Télérama.fr

 Jean-Luc Godard est un nom mythique du cinéma. De son premier long métrage, À bout de souffle (1960) jusqu’à Adieu au langage (2014), il a abordé tous les genres cinématographiques. Son travail comprend aussi bien des films documentaires que des films de fiction, des films de quelques minutes que des longs métrages, des séries vidéos que des publicités. Il a même élargi le champ des différents genres par la réalisation de nombreux  essais documentaires ou de fiction. Godard est un cinéaste qui a profondément révolutionné l’écriture cinématographique et changé notre regard. Certains de ses films sont devenus des classiques et s’ils ont peut-être perdu le pouvoir provocateur qu’ils ont eu au moment de leur sortie sur les écrans (car avec le temps le cinéma a assimilé ses fulgurances et ses audaces), d’autres, au contraire, plus récents, déconcertent par leur complexité, l’abondance des références et des citations, par la nouveauté et l’originalité de leur langage, loin de toute narration classique.

Après avoir passé son baccalauréat en 1949, Jean-Luc Godard s'inscrit à la Sorbonne en Propédeutique et certificat d'ethnologie. Le jeune homme fréquente surtout les ciné-clubs et la Cinémathèque Française d’Henri Langlois, installée rue de Messine depuis 1948. Au « ciné-club du Quartier Latin », Jean-Luc Godard fait la connaissance des futurs cinéastes de la Nouvelle Vague, Jacques Rivette et Eric Rohmer, qui fondent La Gazette du cinéma. C'est dans cette toute jeune revue qu’il signe ses premiers textes, adoptant parfois le pseudonyme de Hans Lucas (« Jean-Luc » en allemand). Le rêve de Godard est alors de publier un roman chez Gallimard. Que ce soit dans La Gazette du cinéma ou les Cahiers, Godard mène déjà une réflexion sur le cinéma. Le texte qu’il signe pour le premier numéro des Amis du cinéma, en 1952, a pour titre Qu'est-ce que le Cinéma ?  et se termine par cette phrase : « Aussi, à la question Qu'est-ce que le Cinéma ?, je répondrai d'abord : l'expression des beaux sentiments ». Toutefois, son texte théorique le plus important est Défense et illustration du découpage classique; le jeune homme s’en prend, dans les pages même des Cahiers, à la pensée d’André Bazin qui s’enthousiasme sur la profondeur de champ et le plan séquence, défini par ce dernier comme marque de la modernité au cinéma. Cette défense d’un langage classique réapparaît en décembre 1956 avec  Montage, mon beau souci qui figure dans le même dossier sur le montage que Montage interdit d’André Bazin. De 1956 à 1959, dans les Cahiers du cinéma, mais également dans les pages de l’hebdomadaire Arts, Godard livre ses grands textes sur Frank Tashlin, Alfred Hitchcock, Nicholas Ray, Ingmar Bergman, Anthony Mann, Douglas Sirk, Fritz Lang, Boris Barnet, Roberto Rossellini, Jean Renoir et Jean Rouch. Il aime ce qu’il appelle « l’art et la théorie de l’art », un cinéma qui montre, et qui s’interroge sur lui-même.

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Ce film est interdit aux moins de 16 ans.